Coupe du monde 2023 : L’art de jongler entre football et rugby

Catégorie : Pratiques

La Coupe du monde 2023 oblige plusieurs gestionnaires de pelouse de Ligue 1-Ligue 2 à jongler entre football et rugby. Une gymnastique particulière et précise qui doit assurer une surface de jeu optimale à la fois pour les rugbymen et les footballeurs.

La tenue des matchs de la Coupe du monde 2023 dans des stades qui accueillent également la Ligue 1 et la Ligue 2 oblige les gestionnaires de pelouse à jongler entre football et rugby dans des laps de temps très (très) restreints. Une véritable gymnastique lors de laquelle il faut prendre en considération les exigences de chacun des deux sports, bien différentes sur certains points. Dans des propos recueillis par So Foot, Stéphane Cazabat, responsable de la pelouse du Stadium de Toulouse, et Marianne Petiot, directrice des sports à Saint-Etienne Métropole, se confient sur cette gymnastique.

Des exigences différentes

Une pelouse de football et une pelouse de rugby ne répondent pas aux mêmes exigences. Pour les rugbymen, par exemple, il est préférable que le terrain soit sec pour éviter de perdre le contrôle du ballon, là où les footballeurs préfèrent que le ballon fuse. Il est donc nécessaire de bien gérer l’humidité du gazon en fonction des deux sports. « On décale nos arrosages selon les matchs. Quand il y a un match de rugby à 13 ou 14h, dès le matin, on brosse manuellement avec des balais à rosée de trois mètres de large pour faire tomber l’humidité sur le sol », explique Stéphane Cazabat dans un article de So Foot.

Idem au niveau de la hauteur du gazon. Une pelouse de rugby optimale a une hauteur entre 28 et 35 mm. C’est plus long qu’au football. « On booste la pelouse pour qu’elle pousse. La période est assez propice, on n’est pas en plein mois de juillet. On arrose, on utilise des engrais, de la luminothérapie. Chaque jour, on tond largement 3-4 millimètres de hauteur d’herbe. En rugby, la tolérance est entre 28 et 35 mm. On a une marge. S’il faut que la pelouse pousse de 2-3 mm, elle le fait largement. » indique Marianne Petiot, directrice des sports à Saint-Etienne Métropole, auprès de So Foot. Enfin un autre aspect qui diffère : les lignes de traçages. A Geoffroy Guichard, la peinture utilisée est effaçable au balai et au jet d’eau afin de pouvoir passer d’une configuration à une autre rapidement.

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Des pelouses sur-sollicitées en très peu de temps

C’était évidemment prévu, mais les pelouses connaissent une fréquentation très importante. Si le calendrier de Ligue 1 a pris en compte la Coupe du Monde en faisant jouer au maximum les clubs résidents des stades hôtes à l’extérieur, il n’empêche que certaines périodes offrent un timing ultra serré aux groundsmen. C’est par exemple le cas de la pelouse du Groupama Stadium de Lyon qui en l’espace de quatre jours va accueillir trois matchs dont deux de rugby !

D’autant plus qu’il faut ajouter, au rugby, le traditionnel entraînement du capitaine. « On parle beaucoup des matchs, mais on a aussi le captain run. En réalité, en fonction du type d’entraînement mis en place à ce moment-là, on a presque deux matchs de rugby en deux jours, la veille de match et le jour de match. Cela sollicite beaucoup les pelouses », poursuit Marianne Petiot.

 

Angoisse et pression

A cette charge de travail très intense il faut également ajouter toute la pression du résultat. Les projecteurs sont braqués sur les pelouses, et les personnes en charge de leur entretien seront les premières pointées du doigt en cas de couac.

L’épisode du soulèvement de la pelouse du Stade Pierre Mauroy pendant une mêlée lors de France-Uruguay le montre bien. Si à l’heure actuelle aucune autre déconvenue ne s’est produite, un soulèvement de ce type reste une angoisse permanente pour les autres stades. « On a tous cette angoisse de la pelouse qui se soulève. La pelouse arrive par rouleaux de dix mètres, et elle est plaquée. Dans la plupart des stades, on a réalisé des plaquages pendant l’été. Les jonctions ne sont pas complètement faites, cela demande plusieurs mois. Ça peut arriver que les bandes se soulèvent selon les appuis. A Geoffroy-Guichard, on coud les zones un peu fragiles entre elles pour améliorer leur tenue », confie la responsable de Saint-Etienne Métropole.

Pour Stéphane Cazabat, il y a une grande part de chance dans la réussite d’un plaquage de gazon : « Quand on fait un plaquage, c’est une greffe. C’est toujours un pari. Les gens pensent qu’on déroule un tapis et que ça joue, mais il y a un gros travail à faire derrière, et une part de chance, pour l’implanter dans le substrat. »

Dans cette situation, certains clubs résidents s’inquiètent pour leur équipe. « Ils ont très peur de se retrouver avec un champ de patates au mois d’octobre, ils sont d’une exigence élevée. A les écouter, il faudrait qu’on achète une pelouse après chaque match », souffle une métropole à So Foot. C’est là toute la difficulté de devoir partager une pelouse dans une période très intense.

Corentin RICHARD

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