BT Murrayfiled : « Le climat de rugby le plus difficile de l’hémisphère nord »

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A l’occasion du Tournoi des Six Nations, Gazon Sport Pro H24 vous propose un tour d’horizon de l’entretien des six pelouses de la compétition. Pour ce deuxième épisode, rendez-vous à Edimbourg dans le très célèbre BT Murrayfield.

A chaque rencontre du XV du Chardon, le stade BT Murrayfield est le témoin de la communion entre près de 67 000 spectateurs et les joueurs de rugby écossais, reprenant tous ensemble le mythique « Flower of Scotland ». Outre une atmosphère particulière, reconnue dans le monde du rugby, Murrayfield offre aux joueurs une surface de jeu de qualité, et c’est en grande partie grâce à Jim Dawson.

Un virage vers l’hybride inévitable

Jim Dawson est le Head Groundsman du BT Murrayfield depuis novembre 2010. Avant d’arriver au stade basé à Edimbourg, il a occupé le poste de Head Groundsman au Falkirk FC durant 15 ans. Les premières années de Dawson à Edimbourg ont notamment été marquées par un changement de pelouse. En effet, en novembre 2013, la pelouse a subi une attaque de nématodes qui a causé d’importants dégâts au niveau de la zone racinaire malgré la pulvérisation d’ail et d’autres traitements.

Au printemps 2014, la Scottish Rugby Union décide de remplacer la pelouse. Le gazon nature laisse alors place au Desso Grassmaster, un système de gazon hybride qui a tout changé selon Dawson. « Le Desso Grassmaster a changé la donne au niveau de notre calendrier de maintenance et a amélioré la capacité de la pelouse », déclarait-il pour Turf Matters en 2018. A ce jour, ce choix représente le plus gros investissement de la SRU depuis le réaménagement du stade en 1994. « Nous faisons cet investissement important parce que nous sommes préoccupés par les problèmes que notre terrain et d’autres au Royaume-Uni ont rencontrés, nous estimons qu’une surface renforcée est désormais nécessaire pour répondre aux exigences du rugby professionnel », se justifiait la SRU. Selon Jim Dawson, cette pelouse peut atteindre une durée de vie de 13 à 14 ans. Elle permet notamment au BT Murrayfield d’accueillir plus facilement des concerts.

« Le climat de rugby le plus difficile de l’hémisphère nord »

L’une des principales caractéristiques du BT Murrayfield est d’être le stade de rugby le plus au Nord de Grande Bretagne. Selon Jim Dawson, c’est la raison pour laquelle l’entretien du stade écossais diffère de celui de Twickenham et se veut difficile. La SRU parle du « climat de rugby le plus difficile de l’hémisphère Nord ». « La principale différence entre nous et Twickenham est la lumière du jour. Lors du passage à l’heure d’hiver, l’herbe veut rentrer en dormance. Avec l’éclairage de notre stade et le chauffage au sol, nous lui disons de ne pas s’endormir et de continuer à travailler, ce qui la stresse » explique le Head Groundsman. Le stade est équipé du chauffage au sol depuis 1991. Il avait été installé à l’occasion de la Coupe du monde 1991 qui se tenait dans les pays du Tournoi des V Nations.

« Nous en sommes arrivés au stade où nous examinons les choses de manière hebdomadaire plutôt que mensuelle. Parfois, c’est juste pour peaufiner un peu les choses. Mais il faut aussi parfois laisser les choses telles quelles pendant trois ou quatre jours. Et tous les groundsmen savent que ne rien faire et la chose la plus difficile pour nous », ajoute Jim Dawson.

Outre le XV écossais, Murrayfield accueillait également les matchs de Pro 12 d’Edimbourg Rugby. A cette occasion, la capacité du stade passait de 67 000 à 12 500 places. Mais depuis 2021, l’équipe de rugby a un nouveau domicile : l’Edimbourg Rugby Stadium. Construit au pied du Murrayfield, ce nouveau stade peut accueillir 7 800 spectateurs. La pelouse artificille Greenfield MX Elite est identique à celle du Scotstoun, le stade des Glasgow Warriors également entretenu par Jim Dawson.

Jim Dawson (troisième en partant de la gauche) chouchoute le BT Murrayfield depuis plus de 10 ans. Source : Turf Matters

 

Quand la venue de Liverpool a stressé Jim Dawson

Si Jim Dawson est aujourd’hui Head Groundsman d’un des plus emblématiques stades de rugby au monde, l’un des plus grands défis auquel il a dû faire face ne concernait pas le XV du chardon. Dans une interview accordée à Turf Matters, l’Ecossais a confié que la venue de Liverpool à Murrayfield pour affronter Naples en match amical en juillet 2019 avait été l’un des chantiers les plus stressants de sa longue carrière. Hyper enthousiaste lorsqu’il a appris que son club préféré jouerait sur la pelouse à laquelle il voue son quotidien, le groundsman a très vite déchanté. Le stade accueillait un concert des Spice Girls début juin. La rénovation de la pelouse avait été programmée dans la foulée du concert, à 5 semaines et demie du match des Reds.

Tiraillé entre la volonté d’offrir un terrain parfait aux Champions d’Europe en titre et un délai restreint agrémenté d’une météo compliquée, Jim Dawson craque au bout de trois semaines. Très vite, conscient que quelque chose ne va pas mentalement, le groundsman se tourne vers son service RH, très réactif et discute avec ses supérieurs. Quelques heures plus tard, Jim consultait un psychiatre. « Parler aux gens m’aide à surmonter mes problèmes de santé mentale », confie-t-il.

Après une pause de deux semaines pour couper, il revient au stade 4 jours avant le match. La pelouse était opérationnelle grâce au bon travail de son assistant, Alex Latto, et le Head Groundsman s’est même vu offrir un ballon dédicacé par Jurgen Klopp, l’entraineur de Liverpool. Si cette épisode est révélateur des problèmes de santé mentale qui peuvent émaner de la filière, Jim Dawson conclut son interview en livrant un précieux conseil à ses homologues : « Le plus difficile est de reconnaitre que vous avez un problème, car vous pensez que vous admettez votre défaite. Parfois, il suffit juste de dire qu’on a besoin d’aide. »

Corentin RICHARD

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