Hippodrome de Compiègne : 5 disciplines sur gazon

Catégorie : Pratiques

Avec ses trois pistes, l’hippodrome de Compiègne accueille 5 disciplines sur gazon : le plat, le saut de haies, le steeple-chase, le cross-country et le trot attelé. Une polyvalence qui met à rude épreuve l’équipe d’entretien de 4 personnes dirigée par Jérôme Bergogne. 

Il faut remonter à la fin du XVIIIe siècle pour trouver traces des premières courses hippiques organisées à l’hippodrome de Compiègne. Dix-huit années après la création de l’hippodrome de Longchamps et plus de quarante ans après celle de Chantilly, un nouvel hippodrome s’érigeait aux abords de la Capitale. Au fil des années, l’hippodrome de Compiègne s’est démarqué par la multitude de spectacles qu’il accueille et offre à ses spectateurs. En effet, tout au long de la saison, l’enceinte accueille sur 3 pistes engazonnées toutes les disciplines du galop, avec le plat, le saut de haies (obstacles identiques), le steeple-chase (minimum quatre obstacles différents), le cross-country (obstacles naturels), ainsi que du trot attelé. En 2022, l’hippodrome a accueilli 33 réunions de courses : 18 sur la piste de plat de 2200 m (16 en galop et 2 en trot) et 15 sur la piste d’obstacles.

D’importants travaux réalisés en 2017

Golf de Compiègne avant les travaux de 2017

Cette diversité de courses, notamment du côté des courses d’obstacles, est le fruit de la décision prise en 2016 par France Galop de rapatrier les courses d’obstacles de l’hippodrome d’Enghien sur celui de Compiègne. L’objectif de l’organisateur était de regrouper ses épreuves sur un seul site afin de ne plus payer qu’un seul loyer et de réaliser ainsi des économies. Ce transfert a nécessité d’importants travaux d’agrandissement des pistes à l’hiver 2016 : la construction de nouvelles pistes de plat et de steeple, tandis que la piste de haies était déplacée à l’intérieur sur l’ancienne piste plate. Le Golf de Compiègne, imbriqué au cœur des pistes depuis 1896 et qui louait le terrain à la Société des courses de Compiègne, a, lui, été obligé de fermer. Dans le même temps, l’arrosage a été refait et une nouvelle station de pompage a été installée et associée à une bâche à eau de 2000 m3.

Arrivé en 2020, Jérôme Bergogne, le régisseur de l’hippodrome, n’a pas connu ces travaux d’envergure. Issu de la filière Paysage (il possède un BTSA Aménagements paysagers), il est passé par le Lycée de Dunkerque pour se spécialiser dans les terrains de sport : d’abord via un CS Jardinier de golf et de terrains de sport engazonnés puis avec une licence professionnelle Intendant de parcours obtenue en 2017. Dans le cadre de sa formation, il a travaillé au golf de Mont Griffon avant de rejoindre le monde des chevaux comme saisonnier à Chantilly. Il a ainsi œuvré deux ans au centre d’entrainement puis à l’hippodrome. Recruté à Compiègne en 2020, il a été formé durant deux années par son prédécesseur avant de prendre les rênes de l’entretien de l’hippodrome en janvier 2022.

Un entretien en équipe restreinte

Pour entretenir les 10 hectares de gazon, Jérôme Bergogne dispose de seulement trois autres personnes à temps plein, ce qui ne lui permet pas de réaliser toutes les opérations qu’il souhaiterait. D’autant que la multiplication des disciplines complexifie le travail d’entretien, chacune ayant ses particularités. Par exemple, l’indice de pénétrométrie diffère entre la piste de plat (entre 3 et 3,5) et celle de haies (minimum 4).

Tondeuse attelée RotomecLes pistes, composées d’un mélange 4 Ray-grass, sont tondues généralement trois fois par semaine à 13 cm. Le régisseur a à sa disposition une tondeuse attelée Trimax Pegasus de 6,10 m de large et une Rotomec de 5,10 m (photo ci-contre). Il privilégie la Rotomec qui tasse moins le sol et couche moins le gazon que les rouleaux de la Trimax. Il utilise toutefois la Trimax en alternance avec la Rotomec pour limiter le tassement du sol lié aux passages répétés du tracteur au même endroit. Chaque tonte mobilise une personne pendant 8 h. Aucun défeutrage n’est réalisé par manque de main d’œuvre.

A l’approche des courses, un décompactage est fait 2 à 3 semaines avant l’échéance avec un Redemix Vertidrain.Lorsque de fortes pluies sont annoncées, une aération à lames avec un matériel Noblat est effectuée deux jours avant les courses.

Le jour de course, outre les opérations logistiques de positionnement des stales et de déplacement des haies mobiles, l’équipe d’entretien doit reboucher les pistes. Pour ce faire, Jérôme Bergogne fait appel à plusieurs intérimaires. « Lorsqu’il y a des courses de plat, je prends 16 intérimaires pour le jour J et le lendemain de courses. Quand il y a des courses de saut de haies, je peux en prendre 8 le jour J et jusqu’à 25 le lendemain si la piste est très abimée », précise-t-il. Plus souple, la piste de haies nécessite davantage d’attention après les passages des chevaux, surtout au niveau des appels et des réceptions.

Une fois les courses passées, les pistes sont rebouchées et roulées. Un second décompactage est réalisé 15 jours plus tard. « Parfois, je repasse la Trimax avec ses rouleaux pour refermer les ouvertures liées au décompactage », ajoute-t-il.

Un plan de fertilisation amené à évoluer

Concernant le plan de fertilisation, des apports d’engrais sont effectués tous les deux mois. Ils débutent en mars avec un engrais de type agricole 27.0.0. « On n’a pas vraiment le choix étant donné que la plante n’est pas encore réveillée et qu’il y a des courses : il faut que ça pousse », justifie le régisseur. Ensuite, l’apport se fait avec de l’engrais enrobé à 20-30 % en 15.5.15 jusqu’à l’automne. Il bascule début octobre sur un engrais 12.5.20 plus riche en potassium pour préparer le gazon à l’hiver. La fertilisation est interrompue fin octobre sur le plat et mi-novembre sur la piste de haies. Aucun amendement organique n’est pour l’instant effectué.

Jérôme Bergogne précise qu’une analyse de sol vient d’être réalisée (la précédente étant ancienne) et qu’il attend les résultats pour octobre afin de pouvoir faire évoluer ses pratiques culturales. « Pour suivre l’évolution de son sol, c’est hyper important. C’est difficile de changer tant que je n’ai pas ces informations », détaille-t-il. Il prévoit de faire par la suite des analyses tous les 2 à 3 ans.

L’ensemble du système d’irrigation porte la marque Rainbird et sa gestion est centralisée. L’eau est pompée par forage à l’aide de deux stations. Au total, entre les Rainbird 750, 751, 950 et les VP3 de chez Toro, il y a 900 arroseurs sur les pistes positionnés en triangulation. Le sol de nature sablonneuse est très perméable. « Ici, on peut prendre 20 mm de pluie la veille et ne rien voir le lendemain », affirme Jérôme Bergogne.Certaines zones demandent plus d’irrigation : c’est notamment le cas d’un virage asséché par un courant d’air venant du nord et d’une zone autour de laquelle des arbres centenaires ont été abattus, entraînant une plus grande exposition au vent.

Un gazon soumis à rude épreuve l’été

Deux fois par saison, vers fin juillet début aout, l’hippodrome de Compiègne accueille des courses de trot sur gazon. Et là encore, l’entretien doit être adapté.La tonte est abaissée à 11 cm et le gazon ne doit pas être arrosé pendant les 4 jours précédents la course afin que le sol soit suffisamment dur. Dans une période qui est déjà compliqué pour le couvert végétal, le gazon subit à la fois un stress hydrique et est aussi abimé par le passage des roues des sulkys sur un sol plus sec qu’à l’accoutumée. « Ces courses arrivent un peu au pire moment. Normalement, c’est une période où il faut préserver le gazon », constate le régisseur. Pour renforcer le gazon avant ces courses, il a fait le choix d’appliquer un engrais d’hiver en amont.

Confronté à la période de sècheresse qui sévit actuellement en France, Jérôme Bergogne a fait évolué l’entretien. Afin de permettre au gazon de garder une certaine fraîcheur, les tontes sont limitées à une seule par semaine, voire deux pour la piste de plat. Elles sont effectuées tôt le matin, à partir de 6 h. Les travaux mécaniques tels que les décompactages et aérations sont à éviter. « On ne peut pas aérer, sinon la consommation d’eau s’en ressent. On évite de décompacter pour ne pas abimer les racines. Il ne faut pas endommager le gazon », précise le régisseur.

Corentin RICHARD

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