CAN 2023 : Les pelouses au rendez-vous ?

Catégorie : Pratiques

La CAN 2023 a débuté le 13 janvier 2024 en Côte d’Ivoire. Le début de la compétition a séduit les suiveurs, que ce soit au niveau du contenu des matchs mais également de la qualité des pelouses. L’occasion de faire un tour d’horizon des pelouses qui accueillent la compétition.

La 34e Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2023 a débuté le 13 janvier 2024 en Côte d’Ivoire. Les 24 prétendants pour le titre continental disputeront un total de 52 matchs, réparties sur 6 stades. A cette occasion, le Comité d’Organisation de la CAN (COCAN) et l’Etat ivoirien n’ont pas lésiné sur les moyens pour s’offrir des infrastructures à la hauteur des ambitions du pays : organiser la meilleure CAN. Et cela passe nécessairement par des pelouses de grande qualité.

 

Les 6 stades de la CAN 2023 :

      • Stade Alassane Ouattara d’Abidjan (pelouse hybride)
      • Stade Félix-Houphouët-Boigny d’Abidjan (pelouse hybride)
      • Stade de la Paix de Bouaké (pelouse naturelle)
      • Stade Amadou Gon Coulibaly de Korhogo (pelouse hybride)
      • Stade Laurent Pokou de San Pedro (pelouse naturelle)
      • Stade Charles-Konan-Banny de Yamoussoukro (pelouse hybride)

 

Des inquiétudes vite levées au stade d’Ebimpé

Neuf ans après l’attribution officielle du tournoi à la Côte d’Ivoire et près d’1,5 milliards de dollars d’investissement plus tard, la compétition phare du continent africain a débarqué sur les terres des Eléphants. Pour l’occasion, deux stades ont été rénovés (Abidjan et Bouaké) et 4 nouvelles enceintes sont sorties de terre. La compétition a une aura internationale et les pelouses sont évidemment sous les feux des projecteurs. Et si la précédente CAN au Cameroun avait suscité de vives critiques concernant la qualité des terrains, l’événement semble pour l’instant séduire tout le monde.

Tout n’a pas été parfait toutefois, et les organisateurs ont dû gérer quelques imprévus. Ce fut le cas notamment au Stade Alassane Ouattara d’Ebimpé qui a accueilli le match d’ouverture. Sa pelouse avait quelque peu inquiété en octobre dernier, à quelques mois de la compétition. En effet, en plein match amical, le gazon ivoirien s’était retrouvé totalement inondé en raison des précipitations. Après une polémique de quelques jours, plusieurs correctifs ont été apportés. « La pelouse, on peut dire qu’elle est réglée. On a d’abord renforcé le dispositif de drainage en créant des fentes de suintement qui ont renforcé le dispositif existant. Après cela, il y a eu des manœuvres de compactage, qui sont des exercices réguliers d’entretien d’une pelouse », confiait le directeur du stade, Séraphin Douehi, dans les colonnes de RFI.

Chargée par les autorités ivoiriennes de la construction, la remise en état et la maintenance de 11 surfaces de jeux en gazon naturel, la société française Gregori International est intervenue sur la pelouse d’Alassane Ouattarra. « La situation du stade d’Ebimpe s’explique par plusieurs facteurs : la présence d’une couche d’algues, la présence d’une couche de feutre, la présence du feutre géotextile au-dessus de la couche drainante, une pente en travers trop faible et une planimétrie présentant des anomalies », explique Didier Pascal, directeur de travaux et responsable de l’agence Afrique de l’Ouest chez Gregori International.

Pour rectifier le tir, plusieurs opérations ont été réalisés dans les 4 jours suivant l’inondation : la mise en place de fentes de suintement (51) tous les 1,5 m dans le sens de la longueur, ce qui a permis d’arracher le feutre géotextile, le bouturage sur les fentes de suintement avec le bermuda récupéré des tranchées de fentes, un travail du sol en surface (Verticut) et en profondeur (Vertidrain), des fertilisations et l’application de produits anti-algues, le regarnissage avec les mêmes graminées en place et des sablages de planimétrie en 3 opérations.

 

Un climat particulier très humide

Outre le terrain d’Ebimpé, Gregori International a eu à gérer la construction de la pelouse principale de Yamoussoukro et ses 4 terrains d’entrainement, la pelouse de San Pedro et ses 4 terrains d’entrainement. Un portefeuille garni qui nécessite une main d’œuvre importante. « Notre département entretien des pelouses est constitué par d’un ingénieur chef de projet, 3 chefs de chantier, 11 chefs d’équipe et une trentaine de jardiniers et jardinières », détaille Didier Pascal.

Face à ce grand chantier, le directeur régional et ses équipes se sont heurtés à trois principales problématiques : l’approvisionnement en engrais spécifique gazon, l’approvisionnement en pièces détachées pour le matériel et un climat extrêmement humide. « Le problème majeur est la présence importante d’humidité. En 2023, nous avons eu une saison des pluies très longue. Les jours de précipitation ont doublé, et la quantité d’eau a augmenté de 15 % par rapport à la normale », ajoute Didier Pascal.

Dans ce climat chaud et humide, le choix des graminées s’est principalement tourné vers le bermuda et le paspalum. La pelouse du stade de Yamoussoukro est constituée d’un mélange de bermuda et de Paspalum Notatum, plus communément appelé herbe de baia, qui présente une forte résistance à la chaleur, au sec et au piétinement tout en ayant une bonne densité. Les terrains d’entrainement de Yamoussoukro, ainsi que la pelouse des terrains de San Pedro, sont garnis de Paspalum Vaginatum, une variété très résistante à la chaleur, qui nécessite peu d’eau et d’engrais, et qui s’acclimate parfaitement en bord de mer (San Pedro est situé sur la côte Sud ivoirienne) grâce à son adaptabilité aux sols salins.

 

La pelouse du stade Laurent Pokou de San Pedro.

Les pelouses de San Pedro ont d’ailleurs charmé les joueurs marocains qui s’y entrainent. « Je crois que c’est le meilleur terrain d’entrainement que j’ai vu depuis que je joue en Afrique », affirmait Bilal El Khanouss. Même son de cloche chez l’avant-centre ivoirien Sébastien Haller, qui a élu la pelouse de San Pedro la plus belle de la compétition.

 

La pelouse d’entrainement de San Pedro accueille la sélection marocaine.

Des pelouses au niveau des ambitions du football africain ?

Alors que la phase de groupe vient à peine de s’achever, la CAN 2023 semble cocher toutes les cases d’une grande compétition : ferveur, matchs intenses, suspense, pelouses de qualité. Bien sûr, la compétition n’en est qu’à sa moitié. Mais peut-on déjà dire que les pelouses ivoiriennes sont enfin au niveau des ambitions du football africain ? « Nous sommes particulièrement fiers d’accompagner la Côte d’Ivoire dans l’organisation de la compétition sportive la plus populaire d’Afrique. Nous le voyons bien, le football africain est en pleine mutation. Le bon en avant se confirme par le succès des équipes nationales dans les grandes compétitions mais également par la montée en niveau des ligues nationales », ajoute Didier Pascal

Il se confirme également par le saut qualitatif du couvert végétal, qui impacte forcément la qualité de jeu. Et pour l’instant, la Côte d’Ivoire a eu tout juste. Le pays compte capitaliser sur ses infrastructures (et ses pelouses) de qualité pour devenir une véritable place forte du football africain et accueillir d’autres nations du football. « Pendant 15 ans, la Côte d’Ivoire n’a pas eu de stade moderne, et la sélection devait aller jouer ses matchs à l’étranger. A présent, ce sera l’inverse. Le pays va devenir un hub sportif dans la sous-région, et les voisins qui ne disposent pas de terrains homologués par la CAF (Confédération Africaine de Football, ndlr) seront les bienvenus chez nous. De cette façon, la Côte d’Ivoire s’imposera comme une nation qui pratique la diplomatie par le sport », déclarait le président de la Fédération Ivoirienne de Football (FIF), Idriss Diallo, dans les colonnes de So Foot. De quoi être un candidat légitime pour accueillir une Coupe du Monde à moyen-terme ?

Corentin RICHARD

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